
Le temps passe vite pour nous, lentement pour d’autres. Il passe vite et l’oxygène de tout pays, qu’est l’argent, risque de devenir rare. Notre économie et surtout les finances de l’Etat vont mal, très mal. Notre pays est sous perfusion, les soins intensifs tardent et ceux qui possèdent la capacité de créer des richesses, donc de participer aux secours, sont paralysés ou presque. Le pays est sur la corde raide au moins pour onze autres mois qui ne prévoient aucune mesure de sauvetage de l’économie. Pire, aucune intention dans ce sens, de la part du pouvoir de fait, qui siège à Carthage. La pseudo-feuille de route, annoncée par Saïed, le 13 décembre dernier, après moult pressions aussi bien internes qu’externes, ne semble guère se soucier du devenir économique du pays, urgence de toutes les urgences. Plus grave, elle focalise tout l’effort du pouvoir sur les projets de Saïed. Celui-ci se propose de tout changer sauf sa situation à la tête du pays. Les racines agricoles, artisanales et commerciales de notre pays nous ont pourtant appris un minimum de planification, d’organisation, de souplesse, de patience, de rigueur, de confiance et de respect, le tout dans une ambiance où règnent les bonnes coutumes parfois érigées en lois. Qualités et valeurs, hélas devenues aujourd’hui rares pour ne pas dire introuvables. D’autant que l’analphabétisme politique, juridique, économique, médiatique et autres illettrismes sont en train de faire le lit d’un populisme qui ne pourrait déboucher que sur le fascisme. L’élément humain restera, hélas, le maillon faible de toute la chaîne. Mais sans aucune éducation efficace ni aucun encadrement valable depuis la naissance, l’élément humain livré, à lui-même, est devenu, pour une large majorité, un sournois et pernicieux parasite, un énorme fardeau, pis, une terrible tare pour toute activité fructueuse. En plus des crises dont le pays est victime depuis au moins onze longues années, nous vivons, en effet et depuis le 25 juillet dernier, une situation qui ne peut qu’aggraver lesdites crises. Opacité, ordres parachutés, avec primauté des projets personnels de Saïed sur ceux de l’ensemble du pays, méthodes et discours belliqueux, abrogation pure et simple de la Constitution, dissolution des institutions qui en découlent, refus de tout dialogue, asservissement des médias publics, etc. La situation d’avant le 25 juillet était infecte, elle est devenue aujourd’hui plus que pourrie. On ne gouverne pas un pays sur la base de décisions illégales, abusives et arbitraires, pendant au moins 18 mois, par des décrets-lois qui vont jusqu’à revoir unilatéralement tout le système politique du pays, domaine de la Constitution et des lois organiques qui en découlent, sans parler de la loi de finances. Nous avons perdu un temps précieux, onze ans après le fameux janvier 2011. Un temps qui aurait pu servir aux réformes nécessaires et aussi pour concevoir et mettre en place un nouveau modèle de développement et pour construire le vrai citoyen. Nous sommes donc en plein dans une situation politique, sociale et économique catastrophique avec un peuple désorienté et à bout. Nous voilà donc au bord du précipice. Celui, comme nous n’avons jamais cessé de le répéter, de la faillite totale, politique, économique, sociale, morale et culturelle. Avec un pouvoir de fait à la tête de l’Etat et les diktats du FMI, à nos portes, nous nous acheminons, en effet, aujourd’hui, vers des situations catastrophiques dues à des mesures qui vont être atrocement douloureuses, car du genre «chirurgie de guerre». Une énième année que l’on risque de perdre, et avec elle ce qui nous reste comme fragiles acquis. Aujourd’hui, et à cause des terribles conflits et dysfonctionnements qui sont en train de détruire l’Etat et d’effriter la société, l’échec de la transition politique, censée remettre le pays sur les rails, est hélas consommé, et ce, à côté de celui fracassant de la transition économique. Aucun salut, donc, en dehors d’un dialogue qui devra déboucher sur l’adoption d’un plan de sauvetage du pays. Un dialogue institutionnalisé sous forme d’un congrès national qui regroupera les représentants de toutes les structures nationales élues, (présidence, parlement, organisations nationales, corps élus, conseils municipaux, conseils scientifiques, etc.) avec exclusion de toute personne sujette à des poursuites judiciaires.